Accréditation

Keynote du Grand Témoin : Gian Luca Farinelli

Le directeur de la Fondazione Cineteca di Bologna, Gian Luca Farinelli est cette année le Grand Témoin de cette 10e édition du MIFC. Et comme le veut la tradition désormais, c’est Gérald Duchaussoy qui a animé sa keynote ce mardi après-midi, jour d’ouverture du marché. 

Il est là depuis les débuts du Festival, Gian Luca. Et d’ailleurs, il a encore, en ce début de keynote, rappelé son plaisir d’être à Lyon, là où les frères Lumière ont tourné le premier film. Et depuis 2013, celui qui dirige la Fondazione Cineteca di Bologna a pris également d'autres fonctions puisqu'il est devenu cette année président du Festival de Rome. Et pour lui, le lien entre cinéma du passé et cinéma du présent est évident car, selon lui, c’est la même chose. Tous parlent le même langage, celui du 7e art et peuvent provoquer la même émotion.  

Après cette introduction enthousiaste, Gian Luca Farinelli a détaillé un peu plus les activités de la Cineteca di Bologna qui agit également comme une société de distribution. Il explique que cette idée est venue de France et de leur envie de voir les films présentés au festival Il Cinema Ritrovato arriver dans les salles italiennes. La Cineteca sort 8 films par an, de septembre à mai, la 1re semaine du mois dans un réseau de salles qui ont une vraie relation avec leur public et qui travaillent leurs sorties. Il assure que, or 2020, le public de ces films est plutôt stable, environ 100 000 entrées par an, et particulièrement jeune. 

La Cineteca est une fondation depuis 2012 seulement. Elle était auparavant liée à la mairie de Bologne mais a toujours eu une volonté d’indépendance. Il y a deux sociétés au sein de cette cinémathèque : les laboratoires de l’Immagine Ritrovata et les salles de Modernissimo. A cela s’ajoute le travail traditionnel de la cinémathèque, à savoir conserver, préserver et mettre en avant le patrimoine. A l’origine, la Cineteca di Bologna a été fondée en 1962 sous l’impulsion de la mairie de Bologne qui faisait alors un vrai effort de modernité par rapport au reste de l’Italie.  En 1982, il y a eu la première salle de cinéma et c’est en 1986 que le festival Il Cinema Ritrovato a été mis en place tandis que les laboratoires sont arrivés en 1992. Une école a même été créée pour former des étudiants à ces métiers de la restauration et c’est en 1995 que les laboratoires ont commencé à faire leurs preuves. Ils ont d’abord fait leur renommée sur les films muets pour d’autres cinémathèques, puis les privés sont arrivés. C’est vraiment avec l’avènement du digital que l’Immagine Ritrovata a vu son activité se développer à l’international en travaillant notamment pour des institutions, pour Gaumont, Pathé, TF1 mais aussi des sociétés américaines et d’extrême-orient. Puis ce fut le tour des fondations comme celle de Martin Scorsese. 

Cofondateur de l’association des cinémathèques européennes à la fin des années 1980, Gian Luca Farinelli a toujours eu à coeur de voir la culture comme un partage. Sa philosophie est que le patrimoine a une valeur et il doit être accessible à tous et toutes. Et selon lui, cette mentalité des cinémathèques est celle qui a triomphé. Il raconte que quand il était jeune, il avait créé un ciné-club pour pouvoir accéder à des films difficilement visibles par ailleurs. Et il faisait payer l’entrée pour payer son petit business de passeur de péloches. Mais désormais, grâce au numérique, tout devient accessible, tout arrive à portée de main et tout peut se partager. Et pour Gian Luca Farinelli, c’est une chance inestimable. Selon lui, le présent sera plus présent que jamais dans nos sociétés grâce à cet accès généralisé et c’est une source d’espoir. 

Encore faut-il atteindre les publics. Les convaincre. Les contaminer avec le virus du 7e art. Et ça, le directeur de la Fondazione Cineteca di Bologna a bien compris que c’était un enjeu majeur. Il le met en pratique en, par exemple, tentant de trouver les bons horaires de séances pour chaque public : 16h le weekend pour les familles, 22h30 pour les étudiants ou encore 2e partie de matinée pour les retraités. Le festival est aussi un bon biais pour attirer les publics vers le patrimoine notamment avec des séances sur la Piazza Maggiore le soir pendant Il Cinema Ritrovato qui attirent jusqu’à 8 000 personnes. Mais surtout il veut se développer et faire de la Cineteca un lieu unique où les gens auront envie de venir, juste comme ça. Ou le lieu primera presque sur la programmation car il est temps, selon lui, de se rassembler. Le cinéma est un sport collectif. Et si l’envie lui a traversé l’esprit de faire une plateforme, il y a vite renoncé, faute de moyens et n’étant pas vraiment persuadé que c’était son rôle. En revanche, en plus de son travail d’exploitant et de distributeur de films, la Cineteca édite aussi des DVD, Blu-rays et autres livres pour « faire ce que les autres ne font pas » et amener le cinéma de patrimoine jusque chez soi. Des éditions travaillées sur lesquelles les équipes de la Cineteca passe du temps : six ans sur un coffret Buster Keaton en deux parties par exemple. Des objets hors marché mais collector. Son ambition? Produire des documentaire sur le cinéma mais cette envie est un peu contredite en Italie par l’accessibilité aux droits en matière d’archives. 

Gian Luca Farinelli en deux films, c'est : L’homme à la caméra de Dziga Vertov dont il a vu, jeune, les 20 premières minutes dans une copie épouvantable. Mais le choc fut intense. Et La passion de Jeanne d’Arc de Carl Theodor Dreyer, le premier film qui lui a donné la sensation qu’on lui parlait directement comprenant ainsi que la notion de « vieux film » n’existait pas. 

Pour le directeur de la Fondazione Cineteca di Bologna « Le patrimoine c’est tout le cinéma, de Lumière à ce matin ». Et pour lui, faire passer ce goût du patrimoine est un acte révolutionnaire. Celui qui se considère comme un « agitateur culturel » croit fort en un avenir où le rapport au cinéma de patrimoine ne va faire que grandir et que nous n’en sommes qu’au début. « On a une accessibilité et une vérité de l’histoire qui n’ont jamais eu lieu auparavant et donc une possibilité de transformation de société inédite » conclut-il avec un enthousiasme qui, en ces temps moroses, réchauffe les oreilles et le coeur. 

 

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