Accréditation

L’état de la filière du cinéma de patrimoine dans les pays à faible capacité de production

Mercredi 19 octobre à 14h30, au MIFC, onze panelistes issus de pays à faible capacité de production se sont regroupés pour évoquer leurs difficultés à faire vivre le cinéma classique sur leur territoire.

Modérée par Vincent Soccodato, du bureau français d’Europe Créative, cette table ronde a abordé plusieurs thématiques, à commencer par celle de la teneur et l’instabilité de la politique que ces pays ont connue, qui interroge la pérennité des archives. Pour certain issus du bloc communiste, la fin de l’URSS, et ses diverses guerres civiles qui ont agité l’Europe, n’a pas été sans conséquences pour le cinéma. En Albanie, depuis la chute du régime soviétique en 1991, la diffusion de films classiques est très impactée expliquent Marinela Ndria et Hermelinda Troqea de l’Albanian National Film Archive (AQSHF), précisant que les titres de propagande ne sont plus montrés. Une perte pour la directrice, qui met en avant leur portée artistique avant leur discours politique : « Il y a de la propagande, mais les images sont vraies ». En Lettonie, les films classiques n’appartiennent qu’à leurs auteurs détaille Dita Rietuma, directrice du National Film Centre of Latvia, difficile alors de les transmettre. Un problème auquel est aussi confrontée Jana Mikulevič, de la direction de la promotion, de l'information et du patrimoine du cinéma au Lithuanian Film Centre. La responsable raconte qu’avec la « cinémastrophe » qu’a représenté la fermeture du studio national de Lituanie toutes ses archives ont été distribuées. Aujourd’hui, l’un des enjeux du pays est de les récolter : un travail engagé il y a 10 ans. La collecte est aussi au cœur des préoccupations de la Slovaquie, car après la dissolution de la Tchécoslovaquie en 1993, une partie des archives slovaques se sont retrouvées en République Tchèque, et inversement. Une problématique révélée par Rastislav Steranka, directeur du National Cinematographic Centre et du Slovak Film Institute, et appuyée par György Ráduly, directeur du National Film Institute de Hongrie, qui voit le patrimoine cinématographique du pays être réparti partout en Europe après les guerres et occupations successives qu’a connu la Hongrie, et notamment Budapest.

La discussion s’est ensuite portée sur la question de la digitalisation et de son budget. Alors que la filière cinéma en France est soutenue par des institutions comme le CNC, les intervenants témoignent d’un manque d’accompagnement, enrayant la chaîne de restauration, diffusion et transmission du cinéma classique. A Malte, où la situation est présentée par le responsable de la culture cinématographique à la Malta Film Commission Jean Pierre Borg, si des financements existent pour le cinéma ils ne priorisent pas le patrimoine. En Albanie, tandis que des discussions avec le ministère de la culture ont eu lieu, il est difficile d’obtenir un laboratoire adapté à la numérisation et restauration du matériel conservé. Pour Antonia Kovacheva et Vladimir Trifonov, de la Bulgarian National Film Archive, la question de la restauration soulève celle de la préservation : « Notre gros problème, c’est que nos autorités se battent pour la digitalisation, qui n’est pas une méthode durable. Nous devons leur expliquer qu’elle ne sert qu’à l’accès d’une œuvre, pas à sa préservation. » En Macédoine du Nord enfin, représentée par Vladimir Angelov, directeur de la cinémathèque du pays, l’État est présent : la cinémathèque est elle-même une institution fondée par le gouvernement. Pour autant, le manque de salles impacte la diffusion et la production de cinéma de patrimoine : seulement quatre salles sont réparties sur tout le territoire. « Nous réalisons des films que personne ne peut voir. »Le streaming se pose alors en voie d’accès privilégiée au cinéma classique : en Lettonie, les titres de la fondation nationale sont disponibles en ligne gratuitement pour dépasser la contrainte des droits du format physique ; en Hongrie une plateforme de VàD est disponible depuis deux ans sur tout le pays et dès 2024 partout en Europe. 

La collaboration internationale dans le cadre de restauration d’archives a également été abordée, notamment par la Slovénie. Nerina Kocjančič, responsable de la promotion et de la distribution du Slovenian Film Centre, a ainsi expliqué que le centre avait débuté en 2015 un travail de digitalisation sur leur matériel pour pouvoir travailler sur 15 films à l’avenir. Une avancée à perfectionner, peut-être avec le concours d’autres nations ? « L’important c’est de développer le savoir local, mais si ce n’est pas assez, il faut commencer à réfléchir à travailler internationalement ».

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