Accréditation

Table ronde documentaire #1 – Où est le patrimoine documentaire ?

A l’occasion de l’Année du Documentaire initiée par la Cinémathèque du Documentaire en janvier, le MIFC a convoqué plusieurs acteurs sensibilisés aux questions relatives au documentaire de patrimoine pour répondre à une interrogation multidimensionnelle : où est le patrimoine documentaire ? C’est autour de ce sujet, dans une table ronde modérée par Pierre-Alexis Chevit (Responsable de Cannes Docs), que se sont passés la parole Alice Lesort, Pauline Girardot Chevaucheur, Moïra Chappedelaine-Vautier, Markus Ruff et Anne Moutot.

 

Cadrer le patrimoine documentaire : une tentative de définition du documentaire de patrimoine

Savoir où trouver le patrimoine documentaire commence par définir ce qu’il est. Pour Anne Moutot de La cinémathèque du documentaire, le documentaire de patrimoine s’oppose à des créations récentes, et s’inscrit dans le passé. Une caractéristique partagée par le reste de la table, dont Markus Ruff d’Arsenal. 

Pour le germanophone, les documentaires de patrimoine racontent leur temps, et peuvent servir à parler du notre. Ils témoignent de leur époque, et doivent être préservés pour cette raison, ajoute Moïra Chappedelaine-Vautier de Ciao Films. Une opinion illustrée par un extrait de Fort du Conquet destruction des archives Vautier, dans lequel le public a pu découvrir René Vautier face au vandalisme de la salle contenant ses archives en 1983 alors que certains de ses films devaient être utilisés dans un procès entre Jean-Marie Le Pen et Le Canard Enchaîné. Pour sa fille, désormais en charge de ses archives, il y avait une « volonté absolue de faire taire ces images ». 

Pour Pauline Girardot Chevaucheur, de Documentaire sur grand écran, les documentaires de patrimoine doivent être reconnus comme une forme artistique, pas seulement comme une archive historique. En ce sens, tout film mérite d’être considéré comme un classique, selon Alice Lesort, des Films du Losange. C’est alors aux diffuseurs et distributeurs d’en faire des classiques.

 

Le patrimoine documentaire, une charge multiple

Reste à savoir où se trouve physiquement le patrimoine documentaire, et dans quel état. Il peut parfois faire partie d’un héritage familial, comme pour Moïra Chappedelaine-Vautier, ou appartenir à un héritage international, comme les œuvres restaurées par Arsenal. Sont alors combinées restauration, digitalisation et présentation, explique Markus Ruff, pour les accompagner au mieux. Le responsable pôle d’Arsenal présente pour expliciter ses propos un extrait de Sudesha, documentaire de 1983 réalisé par Deepa Dhanraj. S’inscrivant dans une composition de huit films sur le travail des femmes en Inde, ce documentaire a été restauré après un travail acharné pour en retrouver les copies existantes. Il a ensuite dû être digitalisé, puis présenté. Aujourd’hui, le documentaire est disponible en ligne.

Se révéler multitâche dans le cadre du patrimoine documentaire est alors une nécessité. Documentaire sur grand écran s’occupe par exemple des conditions nécessaires à la protection des copies tout en soutenant les distributeurs. Chez Les Films du Losange, les ayants droits autonomes sont accompagnés dans leurs démarches, en parallèle des projets de restauration dirigés par la société. Le financement peut également être divisé, entre le CNC et des partenaires indépendants.

Se pose ensuite la question de la diffusion des documentaires de patrimoine. Pour Anne Moutot, le premier objectif est de valoriser les documentaires de patrimoine, pour les rendre accessible sur le territoire national. La Cinémathèque du documentaire aide ainsi à identifier les films documentaires, cherche à mutualiser l’ensemble des acteurs du secteur pour mieux référencer les œuvres de patrimoine et aider à leur restauration, programmation et diffusion. Elle est pour cela partenaire de la plateforme « Film-Documentaire.fr ». Enfin, Alice Lesort affirme l’importance de la diffusion dans le large cadre du cinéma de patrimoine, et donc du documentaire patrimonial. Pour elle, le succès d’une œuvre fait écho à d’autres, et une ressortie peut amener à des rétrospectives et des demandes sur le reste de la filmographie d’un auteur. Elle cite comme exemple la ressortie en 2022 de La Maman et la putain de Jean Eustache, suivie d’un intérêt pour l’œuvre complète du cinéaste, notamment aux États-Unis.

 

La mise en relation des acteurs, un enjeu majeur du patrimoine documentaire

Interrogés sur l’avenir de leurs projets, les intervenants de la table ronde sont revenus sur les différents enjeux de leur pratique. Pour Moïra Chappedelaine-Vautier, la prochaine étape de son ouvrage de restauration concerne l’héritage vidéo, succédant aux films de pellicule qui se trouvent en sa possession.  

De son côté, Pauline Girardot Chevaucheur fait état d’un besoin de clarté quant aux outils de restauration et de diffusion. En ce sens, Anne Moutot apporte un élément de réponse : La cinémathèque du documentaire entend se positionner comme un espace de dialogue entre les différentes entités du documentaire de patrimoine. L’institution souhaite devenir un tremplin, favorisant les synergies entre toutes les entités du patrimoine documentaire.

 

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